mercredi 28 décembre 2011

Bonne Année 2012


Douarnenez, enfants assis sur les rochers
Charles Augustin LHERMITTE (1881 - 1945)
Source : RMN

samedi 17 décembre 2011

Louis CYLKOW (1877 - 1934)


  
   Louis CYLKOW* naît à Varsovie en 1877 sans doute dans une famille d’origine juive. Les données biographiques sont peu nombreuses et il est difficile de dater sa venue en France. L’artiste se formera à l’Académie Julian auprès de Jules Joseph Lefebvre (1836 -1911). La rupture avec la Pologne n’est pas définitive car Louis Cylkow expose à Cracovie en 1904 avec les artistes Léopold Gottlieb (1883 - 1934), Mela Muter (1876 - 1967) et Samuel Hirszenberg (1865 - 1908). Sa carrière se fera essentiellement en France notamment en Bretagne où il s’installera pour devenir un mariniste de talent. On retrouve une première acquisition par le Musée de Nantes en 1920 : une toile représentant la baie d’Audierne le soir (ci-dessous). Elle sera suivie d’une seconde acquisition en 1925. L’artiste expose 40 œuvres aux Galeries Georges Petit en 1923 présentant des paysages bretons et vendéens. En 1928, l’artiste expose à Strasbourg.


Le quotidien nantais, Ouest-Éclair, sera un grand promoteur de son œuvre dans les années 30. Le journaliste J. Cox dira avec justesse «Un minimum de matière pour un maximum d’effet, telle paraît être la devise de Cylkow qui fait de la peinture à l’huile comme on fait de l’aquarelle». L’uniformité des œuvres de Louis Cylkow n’est en effet qu’apparence. L’artiste joue avec finesse sur les vides pour mieux révéler l’atmosphère de ses scènes. Devenu nantais d’adoption, l’artiste livrera ses pensées dans une interview accordée au journaliste Pierre Lamblin en septembre 1927 ci-dessous reproduite.


«Les lecteurs de Ouest-Éclair connaissent bien Cylkow, cet artiste scrupuleux qui consent quelquefois à sortir de son atelier un ou deux de ses tableaux pour les montrer aux Nantais. Nous disons «quelquefois» car Cylkow n'y consent pas assez souvent et c'est dommage. Il suffit cependant de voir un Cylkow dans une exposition, pour être retenu et pour trouver spontanément une correspondance. Quand vous êtes placé en face d'un paysage, d'une étude fidèle, vous dites : «Voilà la Pointe des Poulains, voilà un coin de Brière, un bout du vieux Guérande...» Mais devant un Cylkow, vous rêvez. L'artiste a fixé un moment, une image fugace, détruite d'un coup de vent - si l'on peut dire - la minute d'après. Car Cylkow s'est fait une spécialité, il peint des nuages. Il cherche des effets d'art, des symphonies en ces châteaux mirifiques qui font et défont leur forme, qui s’amassent ou qui s'étirent vers des buts incertains. II les peint, non pas de « chic » dans son atelier, mais en regardant le ciel. Il est ainsi arrivé à acquérir des données météorologiques précises ; il raconte volontiers des anecdotes ou cite des observations personnelles. Il nous reçoit dans un atelier immense où les pas et la voix prennent des sonorités étranges


- Pourquoi je me suis attaché à peindre surtout les états du ciel ? Eh bien, j'ai remarqué que tous les peintres négligeaient cette partie du paysage que je considère, moi, comme essentielle. Tenez, cela tombe sous le sens, le ciel représente toujours - en surface - la moitié ou les trois quarts d'un tableau. Pourquoi alors ne pas s'attacher à présenter un ciel vrai, un ciel vu, un ciel vivant ?...
- Mais les maîtres ?
- Cela peut, en effet, paraître extraordinaire, n'est-ce pas ; mais j'ai parcouru à peu près tous les musées d'Europe. Il m'a été facile de contrôler ce que je vous dis. Les Anciens présentent des ciels stylisés, n'ayant qu'un très vague rapport avec la nature. A l'époque de la Renaissance, il y a bien Tiépolo, Véronèse et Le Titien, mais ils conçoivent et révisent leurs ciels d'une façon purement décorative. Le même poncif servait pour toute une série de tableaux. Les Hollandais qui s'en préoccupèrent peut-être le plus sont Van Goyen et Ruysdael. Avec les temps modernes, on semble comprendre que cette partie du tableau n'est pas négligeable. Au début du XIXè siècle, l’anglais Turner donna à ses ciels un éclat extraordinaire ; le norvégien Diriks est, sans doute, l'artiste le plus proche de nous et qui – vraiment – fit du ciel un sujet. Malheureusement, il sombra lui-même dans la pure fantaisie ; c'était ingénieux, sans plus...
- …
- Remarquez que je ne dis pas, certes, qu'il n'y a pas de jolis ciels ; mais je leur reproche, en général, de n'être pas suffisamment vrais, pas étudiés, pas composés d'après des notes sincères.
- Je vois que, dans votre manière personnelle, le ciel occupe facilement les quatre cinquièmes de vos toiles…
- Oui, cela me permet de peindre de grands pans de nuages... Le ciel, ne croyez-vous pas que c'est l'âme du paysage ? Que penseriez-vous d'un portraitiste qui négligerait les yeux dans une physionomie ? La relation est la même. Le ciel, comme l'eau, d'ailleurs, est l'élément symbolique qui reflète nos états d'âme, toute notre vie intime ; n'est-il pas un peu le miroir de ce qui se passe en nous de plus secret, de plus indéfinissable ? Eh bien, mais je crois que cette raison est assez importante pour décider un artiste à regarder le ciel avec intérêt…
- …
- Je vous ai dit : le ciel et l'eau ; les deux éléments se complètent admirablement. Je suis de ceux-là qui croient qu'il suffit d'un horizon marin sur lequel se pose un décor vivant de nuages pour faire un excellent tableau… Il m'arrive d'ailleurs souvent de comparer le spectacle que nous offre gratuitement le ciel, à une magistrale harmonie des forces, des couleurs et des sons. Il y a tous les thèmes pour ceux qui savent regarder, tous, depuis le plus furieux allegro jusqu'au plus tendre cantabile en passant par l'andante le plus majestueux…
- Depuis que je connais vos toiles, j'ai toujours été frappé par ces mystérieuses transparences que vous obtenez sur vos plages où vient s'élargir la mer ; comment obtenez-vous ces effets surprenants ?
- Ma foi, je ne le sais pas moi-même… le pinceau va…
Nous voulons poser à Cylkow une autre question, mais il suit une idée.
- Vous connaissez Tristan et Yseult ? Eh bien, au 3ème acte, il y a une mesure qui peut résumer toute ma peinture, tous mes essais, toute mon inspiration, si vous le voulez bien, me vient de là…
- Je ne vous demande pas comment vous êtes devenu artiste ; on naît artiste comme on naît poète, mais où vous êtes-vous senti attiré par votre art ?
- Chez vous, dans votre Bretagne, et, pour préciser, à Concarneau… J’ai trouvé là de magnifiques sujets ; la lumière y est d'une telle intensité… J’avais étudié à Paris, dans ma jeunesse, mais j'ai beaucoup creusé par moi-même...
- La peinture moderne ? à Nantes…
- Mon avis est qu'il est fou de vouloir ressusciter en Province ce qui est mort et bien mort à Paris…
Si Cylkow n'avait pas été peintre, il serait devenu musicien il revient constamment à cet art et dit même
- La peinture, voyez-vous, est bien pauvre, il faut le reconnaître, quand on la compare à cette expression supérieure, cette expression « totale » (pour employer un terme à la mode) qu'est la musique. Elle a des ressources si prodigieuses…
Et Cylkow rêve, laissant retomber, dans l'immense atelier où la nuit commence à s'accrocher sournoisement dans les angles, un silence vivant. Aux murs, les tableaux clairs semblent autant de fenêtres ouvertes sur des horizons miraculeux. Je fais un voyage surprenant, tandis que le magicien, près de moi, sourit au filet mince qui monte de sa cigarette et va créer, plus haut, des stratus légers, paisibles et bleus…» L’artiste à la signature rouge s’éteindra en 1934 à l’âge de 57 ans.


* : Nous reprenons ici le prénom francisé de l'artiste qui devait se prénommer Ludwik ou Ludwig (traduit quelquefois dans certaines publications de façon erronée par Ludovic). Dans une correspondance de 1915, l'artiste qui écrit à David Simonsen le fera en français et sous la signature de Louis Cylkow.  

dimanche 6 novembre 2011

Georges BALDENWECK (1882 - ?)


  
   Si elle fut pratiquée par les plus grands, la gravure représentait pour de nombreux artistes avant tout un moyen de subsistance. Fut-ce le cas pour Georges BALDENWECK, graveur actif au début du XXème ? De façon curieuse, cet artiste né le 20 mars 1882 sous le nom de Jules Georges Etienne Baldenweck ne nous laisse que quelques gravures et dessins connus, ainsi que deux distinctions. Sans doute originaire de l’Est comme son nom le laisse supposer, il reçoit en 1912 la mention honorable au Salon des Artistes Français. Nous savons également qu’il fut décoré de la Légion d’honneur en 1936.

Détail

Il est fréquent de retrouver aujourd’hui deux de ses gravures réalisées en Bretagne, l’une représentant le marché sur la place Terre au Duc à Quimper (ci-dessus), et l’autre, le port de Concarneau au pied des murs de la ville close (ci-dessous). Sur cette dernière, la scène est typique du début du XXème avec ses chaloupes sardinières à quai en fin de journée. Les filets bleus gréés au haut des mâts sont mis à sécher. Les hommes s’affairent dans les bateaux. Sur la gauche, un marin prépare la cotriade, soupe de poisson qui nourrira l’équipage de cette chaloupe venue d'un autre port. Ces marins dorment à bord après avoir cabané le bateau, la voile leur servant d’abri. Plus loin, on voit au mouillage un dundee reconnaissable à sa voile de tape-cul, tandis qu’une chaloupe appareille.


jeudi 3 novembre 2011

Kurt PEISER (1887 - 1962)


 
Les petits-enfants de l'artiste Kurt PEISER nous signalent la création du site consacré à leur grand-père. Nous vous en recommandons la lecture et espérons que ce travail assurera à l'oeuvre de cet artiste talentueux et homme de valeurs une plus grande renommée.   


mardi 1 novembre 2011

Yves FLOC'H (1906 - 1990)



   Yves FLOC’H est originaire de Plouguerneau dans le Finistère Nord où il naît en 1906. L’abbé Yann Vari Perrot, vicaire, l’aidera à entamer des études artistiques auprès de Jacques Jullien (1891 - 1963), professeur de dessin à Lesneven. Au début des années 30, Yves Floc’h suit des cours à l’Ecole des Beaux-Arts de Rennes avant d’intégrer l’Ecole Nationale Supérieure des Arts Décoratifs de Paris. Yves Floc’h se marie en 1938 à Marguerite Villard, fille du poète René Villard (1875 - 1940) et petite fille du peintre Jean-Marie Villard (1828 - 1899).


L’artiste deviendra professeur de dessin à Saint-Dié dans les Vosges, puis au sortir de la guerre, il s’installe avec sa famille à Dinan où il enseignera pendant trente ans. Il reçoit les Palmes Académiques en 1957.


La peinture d’Yves Floc’h est profondément ancrée dans cette Bretagne qu’il affectionnait tant ; celle des chapelles, des bords de mer avec ses bateaux échoués, et des bois de l'Argoat. Dinan, Plouguerneau, l’Aber-Wrac'h et Douarnenez seront ses sujets de prédilection. L’artiste sera également inspiré par ses voyages dans le Sud, en Italie et en Espagne. Proche de Désiré Lucas et Marie Réol qu’il fréquentera, Yves Floc’h peint avec des touches impressionnistes les paysages de l’Armor. Il est également un portraitiste de talent comme en témoigne l'autoportrait ci-dessus. L'ouvrage War roudou, Dans les pas d'Yves Floc'h et le site de sa petite-fille Anne* vous feront mieux connaître l’oeuvre de ce peintre attachant disparu accidentellement en 1990.

* : War roudou, Dans les pas d'Yves Floc'h, Le Temps des Livres, juillet 2000. Le site dédié à la mémoire et l'oeuvre d'Yves Floc'h est à l'adresse suivante : http://www.yvesfloch.org/.   

dimanche 30 octobre 2011

Carlos GRETHE (1864 - 1913)

  


   Carlos GRETHE naît le 25 septembre 1864 à Montévidéo en Uruguay où ses parents ont fait fortune. Il quitte l’Amérique pour Hambourg à l’âge de cinq ans. La traversée de l’Atlantique en ces temps relevait d’une véritable aventure et on imagine sans peine l’ébahissement du jeune Carlos face à ces visions d’océan. Son destin de peintre de marine s’y scellera peut-être. Carlos Grethe démarre sa formation artistique à l’Académie des Beaux-arts de Carlsruhe en 1882, puis il intégre en 1884, l’Académie Julian pour deux années. Il y aura pour maître William Bouguereau (1825 - 1905) et Tony Robert-Fleury (1837 - 1911). En 1888, à l’âge de 24 ans, il entreprend un voyage de près d’un an au Mexique avant de revenir à Carlsruhe travailler auprès de Ferdinand Keller (1842 - 1922). A la fin des années 90, l’artiste est appelé à Stuttgart pour remodeler l’Académie des Beaux-Arts. Devenu enseignant, Carlos Grethe partagera alors son activité entre Carlsruhe et Stuttgart développant associations d’artistes, ateliers de création et mouvements. Son travail est reconnu : il reçoit la Médaille d’honneur à Dresde en 1899 et une Médaille au Salon de Paris l’année suivante.


L’œuvre de Carlos Grethe est entièrement tournée vers le monde maritime, des quais du port d’Hambourg aux plages de la Mer du Nord. On retrouve une mention de l’artiste dans le volumineux ouvrage rédigé en 1900 par le Marquis de la Mazelière, La Peinture Allemande au XIXème.


"L’un des meilleurs tableaux de Hambourg est Le retour des ouvriers des docks par M. Grethe de Carlsruhe (1864). Dans la rouge lueur du soir, l’Elbe coule droit vers nous. (…) Et sur l’eau, lourde de reflets polychromes comme en peint M. Thaulow, ces reflets fondus eux-mêmes dans la pourpre du couchant, les barques descendent le fleuve, chargées de marins aux vestes bleues plaquées de reflets rouges, les premières grandes, en relief, avec les figures rudes, les dernières des taches, où les hommes ne sont que des points."


Carlos Grethe fait de la mer une scène de théâtre, illustrant tantôt un enfant à la poursuite d’un poisson volant, tantôt une chaloupe dans la houle, un voilier au portant, ou encore un pêcheur de crevettes sur son cheval. L’artiste exprimera son souhait d’émanciper ses œuvres, de les rendre vivantes, éloignées de la simple imitation attachée au réalisme.


Carlos Grethe décède de façon subite à l’âge de 49 ans à Nieuport. Il laisse l’empreinte d’un grand mariniste de l’Ecole Allemande. Ses œuvres sont présentes dans les musées de Brême et Stuttgart, mais aussi au Museo Nacional de Artes Visuales de Montévidéo en Uruguay.

mercredi 17 août 2011

Lionel FLOCH (1895 - 1972)



   Lionel FLOCH est né à Quimper en 1895. Son père, officier de marine travaille à la pose des câbles sous-marins transatlantiques pour l’administration des postes. La vocation artistique de Lionel Floch est sans doute née auprès de son professeur de dessin au Lycée de la Tour d’Auvergne à Quimper. Nous savons que l’artiste est mobilisé en 1914 à l’âge de 19 ans. Ces années de guerre marqueront l’homme dont on connaît le caractère antimilitariste. Il suit sa formation artistique auprès du peintre fondateur de l’école de Concarneau, Théophile Deyrolle (1844 - 1923), ancien élève de Cabanel et Bougereau.


Ne vivant pas de son art, Lionel Floch sera receveur de l’Enregistrement dans la ville de Pont-Croix dès 1923. Très attaché à cette région du Cap Sizun, il y restera pas moins de vingt-cinq ans. Lionel Floch sera proche de l’homme de lettres Max Jacob avec qui il entretiendra une correspondance fournie. Au début des années 30, il se marie avec Suzanne. A la même époque, il devient également l’ami de Jean Moulin alors sous-préfet à Châteaulin, et artiste lui même. Il les représentera dans les beaux portraits ci-dessous. Nous imaginons la tristesse de l’artiste à la disparition de ses amis. Jean Moulin décède en 1943 dans un train pour l’Allemagne tandis que Max Jacob meurt en déportation l’année suivante dans le camp de Drancy.


La Route des Peintres en Cornouaille* nous apprend que l’homme n’est pas un mondain. Trop entier, il n’est pas apprécié de tous ; excessif et coléreux, il est aussi pudique et timide. Peintre engagé, il n’apprécie que peu l’Eglise et De Gaulle dont il qualifiera la société "de monarchie facilement imposée (…) à un peuple aveuli et crétinisé par le Tiercé, les sports et le cléricalisme".


La peinture de Lionel Floch est à l’image de l’homme, faite de rudesses, illustrant dans des tons graves la vie des hommes et femmes de Cornouaille. Influencé par Lucien Simon (1861 - 1945), son oeuvre s'inscrit dans celle des artistes de la Bande noire. Lionel Floch sera également un graveur et dessinateur de talent. Il aborde la peinture abstraite dans les années 50 mais reste un peintre essentiellement figuratif. Il s’éteint en 1972. Une rétrospective de son oeuvre est réalisée en 2007 par le Musée Bigouden de Pont-l'Abbé et la Maison Commune de Pont-Croix .


* : La Route des Peintres en Cornouaille 1850 - 1950, Groupement Touristique de Cornouaille, juin 1998.  

dimanche 17 avril 2011

Georges RICARD CORDINGLEY (1873 - 1939)


  
   Georges RICARD CORDINGLEY est né à Lyon en 1873 de père français et de mère anglaise. Il débute son apprentissage en 1887 auprès du peintre boulonnais Jean-Charles Cazin (1841 - 1901), puis passe deux années aux Beaux-Arts de Lyon. Il intègre l’Académie Julian en 1889 où il aura pour professeur Benjamin-Constant (1845 - 1902), Louis Martinet (1814 -1895) et Jules Lefebvre (1836 - 1911).


La vie de Georges Ricard Cordingley sera celle d’un artiste engagé qui consacra l’essentiel de son œuvre au monde maritime. Orphelin à 19 ans, il rejoint Londres. La famille de sa mère est au service de la Royauté. Il est présenté à la Reine Victoria qui acquiert trois de ses marines. La revue The British Architect nous apprend que l’artiste sera même invité en 1893 au château de Balmoral. On imagine l’émotion de ce jeune peintre tout juste âgé de vingt ans face à la souveraine alors au fait de son règne.


Devenu portraitiste de la gentry, il délaissera bientôt ce monde de cour pour prendre le large. L’homme est en quête d’une autre noblesse. «La vie d’artiste doit être d’un profond recueillement, il faut anoblir sa vie pour anoblir son œuvre» dira-t-il. La philosophie de Georges Ricard-Cordingley répond parfaitement aux codes du monde maritime empreints de vérité, d’abnégation et de travail. Son naufrage à Terre-Neuve scellera son engagement auprès des gens de mer qu’il croquera sans relâche. Au-delà des ses marines impressionnistes aux subtiles atmosphères, Georges Ricard Cordingley est en effet un dessinateur de grand talent.


Grand voyageur, Georges Ricard-Cordingley parcourut de nombreux pays : l’Australie, la Suisse, le Maroc tout en restant fidèle à son pays d’origine la France. Il résidera à Boulogne, Neuilly puis Cannes où il exposera jusqu’à son décès en 1939. Ajoutons que l’artiste eut trois enfants ; Éliane (1913 - 1945), Louis, lieutenant des Forces aériennes françaises libres qui disparut en service aérien en 1942, et enfin Gabrielle, née en 1924, qui de façon touchante évoque son père dans Le Voyage de Georges Ricard Cordingley, film documentaire de Yves Legrain Crist*. En 2006 et 2007, les Musées de Toulon et de la Marine de Brest rendront un légitime hommage à ce brillant artiste que la mer inspira tant.


* : Kanari Films, 2003. 

dimanche 3 avril 2011

Albert PINOT (1875 - 1962)

  

   Albert PINOT naît en 1875 à Saint-Gilles au sud de la ville de Bruxelles d’un père français et d’une mère belge. Il débutera sa formation artistique en 1890 à l’Académie des Beaux-Arts de Bruxelles auprès de Joseph Stallaert (1825 - 1903), Grand Prix de Rome de 1848. Albert Pinot est naturalisé belge en 1894 à l’âge de 19 ans. Un an auparavant, en 1893, il est un des membres fondateurs du mouvement artistique bruxellois Le Sillon. Ce cercle présidé par Gustave-Max Stevens (1871 - 1946) sera à l’origine composé de jeunes artistes de l’Académie souhaitant revenir aux sources de la peinture flamande et à ses tonalités sombres. Plus prosaïquement, les nombreux peintres du Sillon suivront des parcours individuels, souvent proches de l’Impressionnisme. On les retrouve sur cette affiche de Frans Smeers (1873 – 1960) illustrant le 7ème Salon de 1900. De gauche à droite figurent Alfred Bastien (1873 – 1955) autre membre fondateur du Sillon avec qui Albert Pinot entretiendra une correspondance régulière, Frans Smeers, Philippe Swyncop (1878 – 1949), Maurice Wagemans (1877 – 1927) et Albert Pinot.


L'émouvante photo de 1899 ci-dessous nous présente ces artistes accompagnés pour certains de leur famille au Rouge-Cloître*. L'ancien prieuré au cadre magnifique est alors le lieu de rassemblement de cette communauté de peintres pleinairistes. De gauche à doite, apparaissent Frans Smeers, Henriette Bastien, Alice Degreef, Alfred Bastien, Demalander (?), Albert Pinot avec son haut-de-forme, Amédée Degreef (1878 - 1968) fils du peintre Jean Degreef (1852 - 1894) qui y résida plus de dix ans, Georgette Bastien, et enfin la petite Mariette Smeers.


A partir de 1919, Albert Pinot travaille à Paris puis revient s’installer définitivement à Bruxelles à compter de 1934. Le Nobel nous apprend que le plus français des peintres belges continue néanmoins à séjourner régulièrement à Paris, Anvers et Vétheuil. Il aime aussi travailler à Ostende ou Nieuport comme ses marines en témoignent. Ces deux œuvres illustrent parfaitement le commentaire du Rouge-Cloître sur ces peintres de plein air, qui annoncèrent un impressionnisme autochtone au sein duquel la primauté est donnée au temps de pluie de brume si caractéristique de nos régions. Héritiers du réalisme, ils y joignirent souvent avec finesse la captation du rendu atmosphérique.


A partir de 1944, Albert Pinot est président de la Société Royale Belge des Aquarellistes. Il décèdera à Ixelles en 1962.


* : Centre d'art toujours vivant, retrouvez l'histoire et l'actualité du Rouge-Cloître à l'adresse suivante : http://www.rouge-cloitre.be.